just for you

(extrait)

 aux éléphants tristes

 

“je le deteste il nul moche laid il chante mal il a fait des chose il danse il est nul sale con tant mieu que tes mort”

Posté par lola le 13 juillet 2009 à 04:21:00

 

“de quelle solitude ai-je finalement hérité”

Allen Ginsberg, Reality sandwiches

 

les paysages de la nuit me sont plus familiers que les horizons du jour - quelque part je suis encore cet enfant en pyjama assis à l’arrière de la voiture - je me berce aux vrombrissements du moteur - les paysages défilent - le temps passe - les gens aussi - je suis mikael - karen m’aime sincèrement - debbie est mon ex-femme - debbie et harvey sont des êtres libres - ma femme de chambre me crache à la gueule et conrad continue à me faire bander - 

mikael est en nuisette - derrière lui karen le coiffe 

karen poudre les ailes de mon nez

karen maquille mes yeux et ma bouche

mon chimpanzé nous regarde et je me vois en reflet dans ses yeux

karen me regarde et me caresse maternellement la tête

MIKAEL 

des fois karen, je désespère réellement de l’espèce humaine

KAREN

tu es différent de tous les autres

MIKAEL

ils se sont mis à me trouver bizarre du jour au lendemain

étrange

cinglé

ils ont dit que j’étais une fille

homosexuel

il veut acheter les os de elephant man

il dort dans un caisson à oxygène

rien de tout ça n’est vrai 

rien de tout ça n’existe

je suis un gros homme blanc derrière ma femme debbie sur une motocyclette

la grosse debbie

la folle debbie

tout l’monde est parano

karen fait de la merde avec mes cheveux

je la sens déconcentrée

mais enfin karen, quand tu arrives aux petits cheveux dans la nuque, utilises la brosses douce, celle avec les poils mous

tu le sais pourtant depuis le temps que tu brosses mes cheveux

tu es maladroite aujourd’hui, tu risques de griffer ma peau

KAREN

des fois je suis absente, tu me demandes beaucoup d’attention, tu es un enfant et tu as besoin d’amour

ton regard me cherche et réclame

petit chat blanc 

fils perdu de l’humanité.

MIKAEL

je suis Peter Pan, ils disent que je ne suis pas Peter Pan, mais je suis Peter Pan dans mon coeur

je crois que je suis la personne la plus seule de la terre

mikael débarrasse son crâne de la main de karen - il se lève et sautille dans le grand espace du salon et se met à danser

quand je danse je me sens en vie

mon corps est plus léger qu’une feuille

mon corps s’envole et se mue

je fais bouger mes cheveux devant mon visage

je suis beau

je suis fier

karen et mon chimpanzé me regardent

ils me regardent tous

tout le temps

au fur et à mesure, je me déconnecte de la réalité

1-2

 en fait là j’ai vraiment du mal à exister

MIKAEL

je suis un mutant extraterrestre

le monstre de l’altérité radicale par opposition à la normalité

je suis bizarre

je n’aime pas la limite qui est tracée entre ce qui est autorisé pour les hommes et ce qui est autorisé pour les femmes

ça ne rime à rien

j’ai envie de me maquiller

je suis la voix de tous

je suis un

je suis la tête de la peau

il fait comme si il avait un flingue dans les mains et fait semblant de tirer

Bang Bang

tous abattus

le corps est devenu fou

tout le monde a la tête morte qui a mal tourné

2  

debbie imite sa mère quand c’est à elle de parler

DEBBIE

la pute m’a encore servi une plâtrée de pâtes double par rapport à la sienne 

elle me r’garde bouffer

quand j’débarasse elle observe mon cul

elle observe mon cul tout le long du chemin vers la cuisine

même le regard d’un vieux cochon me dérangerait moins

ma mère

les magazines pour connasses

ma mère

les publicités pour ménagères ont eu raison de sa pauvre cervelle de femme

puis-je réellement lui en vouloir

les médias font de ces faibles d’esprits les pires militaires moraux, soldats de leur nation, putes de l’état 

patriarcal

la pire crème de la crème fasciste

ma mère est-elle une victime?

non

ma mère est une middle-classe comme ma tante ma voisine ma grand mère la connasse du pressing la caissière de franprix et les 60 autres millions 

SA MÈRE

ton cul - mets du noir au moins - ça amincit

DEBBIE

mon cul t’emmerde et préfère porter du jaune bouton d’or 

ça l’empêchera pas de se faire niquer

ça l’amèn’ra ptête même à s’faire sodome 

elle se serre un verre de vin

j’aime ma mère

elle est aussi tranchante qu’une lame de couteau

elle se déteste autant qu’elle m’aime

c’est à dire beaucoup

SA MÈRE

tes bottes 

elles montent trop haut

ton cul est plat comme une galette de kebab vide

ton cul est plat et pue l’parfum

ton parfum pue le cul

DEBBIE

c’est pas parce que je prononce pute ou sodomie que ça fait de moi quelqu’un de vulgaire

pute et sodomie sont dans le dictionnaire

ils font partie du langage

pas toi

je décide de me déséduquer pour me rééduquer

ou de tout déconstruire pour tout reconstruire

ou de tout flamber pour tout flamber pour foutre le putain de feu à ce putain de bordel

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